En juin dernier deux enseignants de sciences-physiques frappent à ma porte pour me présenter un projet intitulé « Low-Tech », à vivre avec leurs élèves. Étant bilingue, comme la quasi-totalité des chefs d’établissement de ma génération, j’intègre immédiatement qu’il s’agit de mettre en œuvre des technologies simples, peu coûteuses, facilement réparables et souvent issues du recyclage d’objets préexistant, en un mot, durables. Sophistication suprême, on m’apprend que ces technologies sont utiles !

In petto je célèbre Lavoisier qui aurait été fier de voir que son propos pouvait s’appliquer à d’autres objets d’étude que de simples atomes ou molécules.

En septembre 2022, l’idée devient réalité. Le projet « Low-Tech » s’installe dans une salle aménagée pour l’occasion. Assis pour trier un bric-à-brac indescriptible, debout derrière des postes à percer ou souder, des élèves utilisent leurs connaissances scientifiques et leur habilité manuelle pour construire des pédaliers générateurs, des batteries de stockage, des mini-éoliennes et mille petites choses utiles pour recharger leurs téléphones portables, leurs tablettes ou encore pour faire fonctionner des lampes.

La définition même d’une compétence relevant de la mise en action combinée de savoirs et de savoir-faire, je me dis alors que nous sommes au cœur de ce que l’École peut proposer de mieux. Avec de telles pratiques généralisées nous pourrions même améliorer notre score Timss… Constatant aussi, avec bonheur, que les jeunes travaillent ensemble avec envie – oubliant pour une fois leur classement Parcoursup – je pense que nous développons notre intelligence collective. Enfin, comme la maison commune brûle et que nous regardons ailleurs, leurs créations sublimant les rebuts me rappellent qu’à la finitude des ressources naturelles nous pouvons opposer notre puissance créative, notre génie humain, pour espérer sauver notre planète.

Cette semaine j’apprends la suppression de l’enseignement de la technologie en 6ème pour financer le renforcement du français et des mathématiques à l’entrée au collège. Curieusement je repense à Lavoisier. Quelque part, dans la belle bibliothèque de la rue de Grenelle, il existe un « petit Lavoisier illustré » qui explique comment recycler les moyens humains et horaires permanents des établissements, au gré des idées soudaines et pour le moins surprenantes du ministre de l’Éducation nationale. Mais est-ce utile ? Durable ? Facilement réparable ? Pas certain. En revanche c’est « Low-Brain » !

Vivien JOBY
Président du SNCEEL