Dans son rapport consacré à l’école maternelle et élémentaire1, rendu public en mai 2025, la Cour des comptes dénonce un fonctionnement de l’enseignement primaire « en décalage avec les besoins de l’élève » et pointe une gouvernance des écoles « restée fondamentalement inchangée depuis le milieu du XIXe siècle ».
« Le déclin des performances des élèves, notamment vis-à-vis de nos voisins européens s’accompagne d’une incapacité de la politique éducative à résorber les fortes disparités de niveau, en particulier la proportion d’élèves en difficulté majeure », soulignent les Sages de la rue Cambon. Une situation d’autant plus paradoxale que « la France est un des pays européens où le temps consacré à l’enseignement des fondamentaux est le plus élevé » et que « la dépense, publique comme privée, consacrée à l’enseignement du premier degré connaît une augmentation continue ».
La Cour dénonce une organisation en décalage avec les besoins de l’enfant. Alors que le président de la République annoncé, le 2 mai 2025, la mise en place d’une convention citoyenne sur les temps de l’enfant2, elle pointe en particulier l’organisation du temps scolaire : « Il n’apparaît pas prioritairement conçue en fonction des élèves » ni des connaissances de la chronobiologie de l’enfant.
Dans leur rapport, les magistrats ne manquent pas de rappeler que le système éducatif français pêche par sa trop grande centralisation et n’intègre pas suffisamment les acteurs. Ils plaident, entre autres, pour une réforme de la gouvernance des écoles primaires « restée fondamentalement inchangée depuis le milieu du XIXe siècle ». Ils invitent à créer un statut de directeur. Ce statut, soulignent-ils, « clarifierait le positionnement du [directeur] vis-à-vis de l’équipe pédagogique ». Il lui donnerait aussi les leviers nécessaires « tant sur le volet des ressources humaines que sur le volet budgétaire » pour « mener une politique éducative en adéquation avec les besoins des élèves ». À ce sujet, la Cour invite à prendre exemple sur le statut du chef d’établissement dans l’Enseignement catholique. Statut qui fait du chef d’établissement « un ‘‘cadre dirigeant’’ qui a la responsabilité du projet éducatif de l’établissement, des projets pédagogiques, de leur cohérence, et de leur mise en œuvre dans le cadre d’une lettre de mission donnée par l’autorité de tutelle ». Dans la foulée, la Cour des comptes préconise aussi « la production systématique d’une lettre de mission pour chaque directeur d’école nouvellement affecté ».
Pour la Haute juridiction l’école doit impérativement évoluer. Il en va de sa capacité à relever trois « défis majeurs » : celui du « bien-être des élèves », en articulant mieux les temps scolaire, périscolaire et extrascolaire et en prenant davantage en compte les besoins globaux de l’enfant, celui de l’usage des outils numériques qui doivent « [être mis] au service des apprentissages [tout] en définissant des limites » et celui de la « transition écologique »
Pour ce faire, elle formule des recommandations qui s’articulent autour de trois axes complémentaires : « le recrutement, la formation des enseignants et les usages pédagogiques » ; « la gouvernance interne des écoles et le statut des directrices et directeurs d’écoles » ; « la nécessité de mieux associer les collectivités territoriales à la politique éducative ». Recommandations dont elle souhaite qu’elles « puissent être mises en œuvre rapidement ».
- Cour des comptes, L’Enseignement primaire. Une organisation en décalage avec les besoins des élèves, mai 2025.
- La convention citoyenne s’est ouverte le 20 juin 2025. Elle remettra ses propositions au président de la République fin novembre.
Véronique Glineur
Rédactrice en cheffe