« Les loups sont entrés dans Paris » a-t-on pu lire dans les colonnes de La Croix. La référence multiséculaire du danger dans nos campagnes a atteint la cité, lieu de vie majoritaire de nos contemporains. Sitôt  déclenchée, la peur fait chemin. Les mesures de sécurité sont généralisées. Attirer l’attention de l’honnête citoyen sur les risques encourus est nécessaire. Personne n’a osé s’élever contre la généralisation de mesures d’exception à l’entrée des établissements, lesquelles, si tant est qu’elles soient praticables, subiront l’érosion de leur efficacité dès que les évènements seront moins prégnants dans les esprits.

Nous avons, avec cette généralisation sans discernement, protégé nos autorités administratives des reproches qu’on aurait pu leur faire en cas de nouvel épisode sanglant. Nous avons sensibilisé au risque la population scolaire. Nous avons développé les peurs chez ceux qui en avaient déjà. Nous avons assurément pris conscience de notre vulnérabilité.

Les ressentiments puissants qui amènent des hommes à des actes terroristes ne seront pas anéantis par les mesures de sécurité les plus draconiennes. Pardonnez la légèreté de la métaphore. Les renards, profitant des faiblesses de la palissade en maints endroits, pourront tout à souhait prélever leur dîme dans la basse-cour. Certains pousseront la malice jusqu’à proposer leur service pour assurer la sécurité du poulailler.

Ainsi va aussi la vie des hommes au milieu de ses prédateurs. Sombre tableau pour une génération qui a cru à la sécurité comme un acquis et non comme un combat.

Ce combat est celui de l’éducation. La question ainsi posée : comment faire grandir en humanité la totalité des enfants, quels que soient leur environnement, leur religion, leurs aptitudes ? Comment leur donner les repères qui les tiendront debout, y compris face à l’adversité ? Quel paradigme promouvoir pour assurer à tous la possibilité de se situer résolument dans l’humanité, sans haine ni ressentiment, inaccessibles aux sirènes de la violence ?

Dans une société aussi plurielle, un seul modèle éducatif ne suffit pas. De ce fait les tentations de replis sur des modèles réputés sûrs annoncent des désastres. Les éducateurs de ce temps ont mission de travailler sur la conscience de l’humanité. Au quotidien, mission de veiller à rejoindre chacun et tous pour qu’aucun ne se sente exclu de cette humanité. Ce quotidien éducatif mérite dans nos établissements toute notre attention. Et même un peu plus !

 

Louis-Marie Fillon

Président