Un défi d’une acuité particulière s’ouvre à la conscience de notre branche professionnelle. Il revêt tout à la fois des aspects législatif, éthique, stratégique, et de gestion. Il se présente comme un chantier pour lequel il nous faut des outils. Il pose la question des rôles respectifs du maître d’ouvrage et du maître d’œuvre. Il ouvre à l’interrogation des finalités qui orientent notre action et du budget que nous lui allouons. Il donne sens à la place que nous faisons à l’humain dans les processus de travail que nous avons en charge d’organiser. Le défi de la formation professionnelle a été saisi par les partenaires sociaux puis par le législateur.

Notre branche porte dans le même temps sur les fonts baptismaux plusieurs certifications qui visent à reconnaître les compétences dont nous avons besoin. Charité bien ordonnée… la formation des chefs d’établissement est maintenant organisée de manière à être reconnue par un titre « Dirigeant des organisations éducatives scolaires et/ou de formation » qui, au-delà des figures imposées, a permis une évolution du référentiel de formation nettement plus en adéquation avec les besoins de compétences de notre profession après les errements institutionnels de ces dernières années. Nous en sommes heureux bien que vigilants, nous qui avions pointé les insuffisances graves des premiers modèles de formation mis en œuvre.

Nous ne pouvons cependant nous contenter de bien former les chefs d’établissement. Rendre fonctionnel le travail de toute une équipe dans nos établissements commande de mettre en place la formation des collaborateurs avec la même attention professionnelle dans tous les domaines éducatif, économique, pastoral, managérial.

À ceux qui nous opposeraient de nous occuper trop de l’encadrement, je réponds que nous devons former les compétences de tous nos salariés, à commencer par celles qui sont le moins disponibles sur le marché de l’emploi par la formation initiale : les compétences éducatives pour la vie scolaire. Nous y travaillons avec un premier CQP(1) d’éducateur de vie scolaire par lequel nous manifestons notre volonté de professionnaliser plus encore et de reconnaître les métiers de vie scolaire.

Face à ce chantier, nous n’oublions pas que nos structures sont de tailles et de moyens très hétérogènes. Ainsi, l’édifice des formations que nous construisons doit permettre des compétences plurifonctionnelles par adjonction modulaire qui réponde à tous les besoins des établissements quelle qu’en soit la taille ou l’organisation. Un chantier passionnant qui vient d’être stimulé par la refonte législative de la formation professionnelle dans ses principes et son financement. En passant d’une obligation légale de financement au principe de responsabilité d’organisation pour les branches professionnelles, la loi, qui reprend l’accord national interprofessionnel du 14 décembre 2013, pose une injonction forte d’organisation de la formation en réponse aux besoins de compétences différenciées et complémentaires pour notre branche. Si le dialogue social peut contribuer utilement à la maîtrise d’ouvrage, les chefs d’établissements entendent bien en être les maîtres d’œuvre. Deux raisons, s’il fallait en justifier. Nous portons la responsabilité conjointe de la gestion de nos établissements et donc du financement de la formation professionnelle. Par ailleurs, nous sommes en charge de l’organisation du travail dans l’établissement et garants des finalités éducatives de l’activité professionnelle agglomérée en son sein. Passer d’une obligation légale à une gestion responsable des ressources humaines nous contraint à quitter définitivement le spectre de la fonction publique d’antan et à entrer dans l’ère des organisations qui développent les compétences dont elles ont besoin, apprennent de manière réflexive de leur activité même, évaluent et valorisent les cheminements professionnels.

Au sein de notre branche « enseignement privé », dans un environnement budgétaire contraint, il nous appartient de faire les choix d’optimisation et d’organisation de la formation professionnelle au meilleur service des établissements. Nous sommes sur un bon chemin de ce côté-ci de la montagne. Il nous faudra bientôt observer comment sur l’autre versant progresse la formation professionnelle des enseignants.

Louis-Marie FILLON
Président

(1) Certificat de qualification professionnelle.