Ils ont enquêté sur l’accès aux établissements privés. Pour ce faire, ont expliqué les trois chercheurs du CNRS(1), ils ont eu recours à la méthode du « testing ». Ils ont construit de toutes pièces les identités de deux pères fictifs – l’un portant un prénom et un nom à consonance française, l’autre à consonance maghrébine – qui ont adressé un message à quelques 4260 écoles et collèges privés pour obtenir des informations en vue de l’inscription de leurs enfants. La conclusion de leur étude est sans équivoque : « Dans 18 % des cas, les établissements privés(2) discriminent le père issu de l’immigration, en donnant à sa demande d’informations une suite moins favorable qu’à celle de l’autre père fictif ».

Un constat qui ne peut qu’interroger. Le statut de l’enseignement catholique ne rappelle-t-il pas que « par choix pastoral, l’École catholique est ouverte à tous, sans aucune forme de discrimination(3) ». Quant à la loi Debré, elle dispose que « tous les enfants sans distinction d’origine […] ont accès aux établissements privés qui ont passé contrat avec l’État ».

Reste que si la discrimination existe dans l’enseignement privé, il faut se garder de toute généralisation. Comme l’a souligné le secrétaire général de l’enseignement catholique, Pascal Balmand, l’étude conduite par les chercheurs du CNRS « montre que, plus de huit fois sur dix, il n’y a pas discrimination(4) ». Par ailleurs, n’en déplaise à certains, la discrimination est présente un peu partout dans le système éducatif tant privé que public. L’institution scolaire dans son ensemble est discriminante : à l’entrée en fonction des lieux de résidence des familles ; au long du parcours scolaire, tous les parents ne maîtrisant pas les codes scolaires ; à la sortie, en fonction du capital social qu’ils peuvent mobiliser pour accompagner leurs enfants dans l’aventure professionnelle…

Cette réalité d’une discrimination partagée ne saurait toutefois dédouaner les enseignements privés de la participation qui leur incombe, du fait de leur association par contrat au service public d’éducation, à la mission de mixité et de cohésion sociale.

Louis-Marie FILLON
Président


(1) La discrimination à l’entrée des établissements scolaires privés : les résultats d’une expérience contrôlée, Loïc du Parquet, Thomas Brodaty, Pascale Petit, janvier 2014. Disponible à l’adresse suivante

(2) L’enseignement privé sous contrat représente 95 % de l’enseignement privé en France. 97,35 % des élèves de l’enseignement privé sous contrat sont scolarisés dans des établissements catholiques, 1,25 % dans des établissements juifs, 0,13 % dans des établissements protestants, 0,02 % dans des établissements musulmans et 1,25 % dans des établissements non confessionnels (Chiffres 2011).

(3) Article 10.

(4) Cf. Le Monde, 14 janvier 2014.